dimanche 4 janvier 2015

" Mes antennes et ma couronne"



Le témoignage de Sylvie

 

Mes cheveux sont des antennes qui me relient à l’univers et aux autres. Ils sont mon premier baromètre du temps qu’il fait. Quand je les frôle au réveil, ils me donnent la météo du jour. Ils sont poreux à l'air, réceptifs à toutes les ondes, ils aiguisent mon intuition des relations humaines : ils sont souples avec des interlocuteurs bienveillants mais se hérissent dès qu’il y a de l’agressivité dans l’air.
Côté féminin, ils me couronnent, m’habillent et me protègent ; ils forment autour de moi un cocon de douceur, une robe gracieuse qui m’enveloppe. Des que je me lève, je les brosse; je me reconnecte à moi-même en suivant leur mouvement. J’adore les toucher, leur finesse fait du bien à mes mains, ils sont tendres et faciles à vivre. Avant d’avoir un enfant, je leur en ai fait voir de toutes les couleurs mais depuis ma grossesse et la naissance de ma fille, j’ai renoué avec leur couleur naturelle.
Petite, je les portais tressés en longues nattes au bas du dos, adolescente mi- longs avec une frange, jeune femme j’ai opté pour des coupes garçonnes à la Jean Seberg; j’avais un compte à régler avec la féminité.

La mémoire de la violence

La coupe énergétique a mis en évidence une longue fracture dans l’implantation de mes cheveux, mon mariage et mon divorce éclairs à dix sept ans, la violence de mon mari. Mes cheveux  ont gardé la mémoire de ce traumatisme.
Sur ma photo de mariage, je joue à la dame avec une horrible permanente et une teinte foncée qui me vieillit. Quelques semaines plus tard, je suis assise sur la table rectangulaire du salon et mon mari me gifle à toute volée. Ma tête vacille sous les claques, mes cheveux s’écrasent sur mon crâne mais je reste droite. Je puise dans l’horreur de l’instant la force de le quitter.
Le souvenir des coups reçus est remonté durant la coupe énergétique ainsi qu’un autre, plus enfoui : celui de ma naissance, trop rapprochée selon ma mère, de celle de ma sœur. Je suis née neuf mois seulement après mon aînée. Ma mère m’a dit que j’avais glissé hors d’elle sans souffrance car son ventre n’avait pas eu le temps de se remuscler. J’aurais aimé qu’elle ressente davantage ma venue, qu’elle ne m’éjecte pas comme un fardeau. Ce non accueil maternel est resté gravé dans mon crâne aussi profondément que des forceps. J’ai voulu tout le contraire pour ma petite fille : j’ai tout prévu pour qu’elle vienne au monde dans le recueillement. Alors que j’avais préparé rituellement sa venue  je n’ai pas réussi à la lâcher ; je voulais la garder au chaud en moi dans l’océan fusionnel de l’attente ; il a fallu me faire une césarienne.
Toutes ces mémoires perdues, des plus anciennes aux très récentes sont remontées par vagues durant la coupe énergétique ; mes freins intérieurs ont lâché les uns après les autres et les larmes ont jailli de mes yeux comme une pluie bienfaisante.

L'adolescence retrouvée

Quand j’ai ouvert les yeux - car cette coupe se passe les yeux fermés - je me suis vue dans la glace, sans défense, les mèches toutes mouillées avec la frange de Sophie Marceau. J’ai eu très peur de ne pas me plaire. Mais une fois ma chevelure séchée, j’ai été éblouie par mon apparence juvénile. Mes cheveux brillaient, se mouvaient dans la lumière avec vitalité. J’avais rajeuni, retrouvé mon adolescence, je pouvais reprendre la route là où elle avait bifurqué.
La coiffeuse a mis mes mèches coupées dans un petit sac et me les a données. Ils formaient un bloc dur sous mes doigts, comme si toute mon histoire était rassemblée dans mon poing. Il me fallait aller au bout de mes peines : je les ai brûlées au grand air, dans une vasque portée par un ange, en les mêlant à des feuilles de laurier. L’angelot m’a aidée à les recycler et à les mener au ciel. 

Propos recueillis par Catherine le 27 Septembre 2014